Alyssa Edwards, l’une des plus grandes stars de l’univers Drag Race, vient faire son show à Paris aux Folies Bergères le 26 mai avec le spectacle Becoming Alyssa.
« Ce n’est pas personnel, c’est du drag ! ». C’est l’une des phrases culte de la drag-queen américaine Alyssa Edwards. Mais en l’occurence, Becoming Alyssa, qu’elle vient présenter le 26 mai prochain aux Folies Bergères sera à la fois personnel ET drag, puisqu’il s’agit d’un spectacle largement autobiographique. Si vous regardez RuPaul’s Drag Race, vous vous rappelez sans doute d’elle dans la saison 5 et dans le mythique All Stars 2 qu’elle aura marqué de ses talents de danseuse, de son humour souvent involontaire et du célèbre claquement de langue dont elle se sert comme ponctuation. Elle ne s’est pas arrêtée là puisqu’après Drag Race, on a pu la voir sur Netflix dans la mini-série documentaire Dancing Queen. Depuis, elle partage son temps entre son studio de danse texan et ses activités de drag-queen qui tourne dans le monde entier. Elle a répondu à nos questions depuis Dallas, la capitale de son Texas natal.
Vous allez vous produire bientôt à Paris. A quoi doit-on s’attendre avec votre spectacle ?
J’ai vraiment hâte d’être à Paris pour venir présenter mon spectacle solo. J’espère que les gens ont aussi hâte que moi. Le spectacle c’est du 100% Alyssa Edwards. C’est l’histoire de ma vie. A la base, je voulais faire un spectacle dont je serais fière. Quand j’ai pris un papier et un crayon et que je me suis attelée à l’écriture, j’ai très vite pensé à des histoires qui m’ont conduite à devenir LA Alyssa Edwards. Puis des souvenirs d’enfance me sont revenus, des choses qui se sont passées avec ma grand-mère… J’ai vraiment le sentiment que ce show est emblématique de ma vie. Beaucoup d’énergie, de la danse, des costumes et du drag ! Je l’ai fait maintenant 80 fois et me voici en route pour Paris ! Dans ce célèbre lieu dont je rêve depuis si longtemps.
Le spectacle se nomme « Becoming Alyssa ». Comment Justin devient-il Alyssa ? Suffit-il de maquillage et d’une perruque ? Ou est-ce bien plus que ça ?
C’est tellement plus que ça ! Pour moi ce qui sépare l’ordinaire de l’extraordinaire, c’est l’extra ! Donc c’est une quantité extra de prières, de répétitions, de préparation, d’énergie. Pour moi c’est toute une expérience. Il ne s’agit pas juste de passer deux heures à se maquiller. C’est une préparation complète parce que je veux tout donner. A chaque fois que je pose un pied sur scène, je veux absolument être une meilleure version de moi-même.
La gagnante de la première saison de rag Race France, Paloma, dit souvent que Paloma est un personnage et que Hugo Bardin est son créateur et que les deux sont aussi importants l’un que l’autre. Cette dualité compte-t-elle pour vous ? Ou voulez-vous juste que les gens voient Alyssa et non Justin ?
Oh non, je suis très fière de mon parcours. Et c’est pour ça que j’ai décidé de construire un spectacle autour de ça. Il m’a fallu de longues années avant de pouvoir regarder dans le miroir l’homme derrière le masque, derrière le personnage, et l’aimer. Je suis très fière de l’homme que je suis devenu. J’étais un petit garçon très timide et introverti lorsque j’ai grandi à Mesquite au Texas. J’ai trouvé ma voix grâce à mon amour de la danse. Puis, créer le personnage d’Alyssa Edwards a été comme un acte de foi qui m’a apporté une dose supplémentaire de confiance en moi que Justin n’aura jamais. Justin est quelqu’un de simple. Je suis un professeur de danse, j’enseigne chaque jour à des enfants, je m’exprime à travers l’art de la danse. Alyssa est tout ce que Justin ne peut pas être. Mais je serais épuisée si je devais être Alyssa tous les jours ! En tous cas, cette part de moi est aussi importante que l’autre.
Votre saison de Drag Race a été diffusée il y a déjà 10 ans. A l’époque, vous étiez déjà une performeuse expérimentée, mais cette expérience vous a-t-elle changée ?
Si vous m’aviez demandé quand j’avais 15 ans comment j’imaginais mon avenir, je n’aurais jamais imaginé tout ça. Ça a vraiment été un « plot twist » dans le livre de ma vie et un coup de pouce du destin. J’ai participé à cette émission de télé sans avoir la moindre idée de ce qui allait se passer ensuite. Et ma vie a changé définitivement pour le meilleur grâce à RuPaul’s Drag Race.
De quel(s) moment(s) êtes-vous le plus fière dans vos participations à Drag Race ?
Oh mon dieu ! Pour ce qui est des challenges, j’ai adoré faire le Annie Oakley, j’ai adoré le Black Swan. Et si vous avez besoin d’un lipsync : Shut up and drive est tellement fierce (féroce ndlr)… Je me souviens aussi de tous ces moments : rencontrer RuPaul pour la première fois, fouler le tapis rouge des MTV Awards avec lui, ce moment où on m’a dit que ma série sur Netflix, Dancing Queen, avait été validée et allait voir le jour… Ces moments sont si nombreux. Je les porte en moi en permanence.
Vous êtes connue pour vos qualités de danseuse. Comment fait-on pour danser « drag » ?
Danser est une chose, mais danser en drag en est une autre, non? Je suis d’accord avec ça. Vous savez, je chorégraphie tous mes numéros, dans le moindre détail. Mais ensuite, je m’imprègne de l’atmosphère de la salle où je me produis. Je ressens l’énergie qui émane du public. Et je me sors de la danse, de la chorégraphie : je performe, j’ouvre mon cœur, et ce que je ressens sur le moment, je l’exprime. Quand je suis sur scène en Alyssa Edwards, je m’éclate, j’explose !
Les conservateurs s’en prennent au drag en ce moment aux Etats-Unis. Une loi a été votée au Tennessee et plusieurs projets de loi ont été déposés dans d’autres Etats, notamment le Texas. Comment voyez-vous les choses ?
Je les vois de la même manière que toute la communauté. Il y a une partie de moi qui est totalement terrifiée. Et je suis en colère. C’est frustrant. Nous sommes en 2023 et notre communauté est encore attaquée, de toutes parts. Je suis attristée que des gens pensent vraiment ces choses-là [les lois prétendent protéger les mineurs d’une supposée mauvaise influence des drag queens]. J’essaie de me dire que tout rentrera dans l’ordre un jour et que la bonté gagne toujours. Mais c’est maintenant qu’il faut faire entendre toutes nos voix. Et il nous faut exercer notre droit de vote. Si vous voulez montrer à quel point vous êtes tristes, en colère, faites-le dans les urnes. Et plus que jamais nous avons besoin de toute la communauté et de nos alliés. Il faut absolument arrêter ça.
Vous pensez que la mobilisation actuelle est suffisante ?
Vous savez, aussi triste cela soit-il, cela ne va que nous rapprocher les uns des autres et nous unifier. Mais c’est maintenant qu’il faut agir. Nous sommes une communauté et chaque partie de cette communauté est attaquée. Il faut nous défendre ensemble. L’union fait la force.