Il y a trente ans, RuPaul, qui n’était pas encore devenue la drag la plus connue au monde, rendait hommage à sa manière - bitchy - aux top models qui faisaient la pluie et le beau temps sur la mode.
A l’heure où la troisième saison de Drag Race France - la version hexagonale de la célèbre émission américaine qui depuis des siècles célèbre les drags tout autour du monde - va démarrer, impossible de ne pas évoquer la carrière musicale de la plus célèbre des drags. A savoir la divaesque RuPaul, qui malgré toutes les critiques et polémiques, se tient toujours bien droite sur son trône.
Avant de devenir la big star américaine qu’on connaît, RuPaul a fait ses débuts dans la nuit new-yorkaise agitée et poseuse de la fin des années 90’s. Membre de la bande des club kids, une bande de post-ados déjantés qui vont mettre à feu et à sang le clubbing de l’époque, à coup de déguisements sans limites, d’insolence camp, de drogues à gogo et de sexe sans limites, RuPaul va vite montrer des velléités d’indépendance et voler de ses propres ailes. On ne la surnomme pas à l’époque « la reine de Manhattan » pour rien ! Entre performances drag, rôles dans des films de série B, drag dans les clubs qui pullulent à New York à cette époque, RuPaul va saisir la balle de la house music au vol. Supermodel of the world, son premier album produit par Eric Kupper, démiurge des studios aperçu aux côtés des DJs stars de l’époque comme Frankie Knuckles et David Morales, est un parfait concentré de ce qui agite les dancefloors gays à l’époque. Un mix de hard-house, d’envolées vocales, de clins d’œil à des figures comme Diana Ross ou Billie Holiday, d’hommage au disco, et de paroles biatches à souhait, dont va émerger le morceau Supermodel (you better work) qui va se frayer une jolie constellation dans la galaxie des tubes de l’époque comme Ride on time de Blackbox, Gonna make you sweat de C&C Music Factory, Finally de CeCe Peniston ou Gypsy woman de Crystal Waters.
Un morceau de house pétasse qui se moque des supermodels de l’époque - Naomi Campbell, Cindy Crawford, Linda Evangelista et Christy Turlington, entre autres - en leur hurlant haut et fort dans les oreilles qu’elles feraient bien de se mettre à bosser ! Critique malicieuse à l’endroit de George Michael qui avec son clip Freedom, trois ans plus tôt, avait placé sur orbite les stars des catwalk, le Supermodel de Ru Paul, s’est imposé au fil des années comme un classique du drag, comme du voguing, avec ses injonctions à être la plus fierce sur le catwalk. Notamment la version déjantée du titre, renommée Strüdelmodel, où, sur fond de piano cabaret, Ru Paul chante avec un faux accent allemand hilarant. Mais le tube house et folle a surtout popularisé les termes sashay et shante, slang de drag-queens à l’époque, qui vont devenir parmi les expressions les plus cultes de Drag Race en forme de « sashay (away) » et « shante (you stay) ». En bref, tu restes ou tu te casses à la sauce drag !