Queer tube : The Weather Girls - « It’s Raining Men »

musique - Queer tube : The Weather Girls - « It’s Raining Men »
Patrick Thévenin

Début des 80’s, deux choristes oversize, sous fond de disco-paillettes, célèbrent une pluie d’hommes tombés du ciel. Il n’en fallait pas plus pour lancer la carrière d’un standard queer hors-norme.

1982, alors que la vague disco qui, à la fin des années 70’s, a converti à la danse le monde entier, vit ses dernières années de faste, overdose du genre et épidémie naissante du Sida obligent, surgit de nulle part  It’s Raining Men. Un hymne bricolé et facile, aussi drôle qu’entêtant, qui va être très vite adopté par la communauté gay comme un standard indémodable, voire un idéal de vie pour les plus gourmands. Composée par le trentenaire Paul Jabara, un des producteurs phares de la vague disco qui a travaillé avec Barbra Streisand ou Donna Summer, et qui rêve de faire une chanson à destination des homos, les premières moutures de la chanson ne convainquent personne. Ni Donna Summer, ni Barbra Streisand, ni Cher, guère attirées par la mélodie facile, ni par les paroles  « il pleut des hommes, hallelujah » dont elles ne comprennent pas forcément le double-entendre. Désespéré de ne trouver personne qui accepte de chanter ce titre auquel il croit plus que personne, Paul Jabara se souvient de Martha Wash et Izora Armstead, deux choristes aux voix tonitruantes qui accompagnaient la diva disco Sylvester. Et qui ont monté un duo, les Two Tons o’Fun, en référence à leurs corpulences XXL. Guère enthousiastes — Martha Wash se souviendra avoir dit à Jabara « je ne sais pas si quelqu’un achètera cette chanson ? » qui lui a répondu aussi sec « cette chanson va être un tube » — les deux chanteuses se laissent finalement convaincre. 

Effectivement, Jabara ne s’est pas trompé. Le refrain du morceau donne lieu à des scènes de liesse et des levers de bras en l’air collectifs et s’impose très rapidement comme un énorme tube dans les discothèques qui poussent comme des champignons à cette époque.

Grâce à un clip bricolé, dont les effets spéciaux, so eighties, nous font sourire aujourd’hui, et où déguisées en Miss météo les deux divas annoncent une rafale d’hommes sexy, jeunes et musclés, qui tombent du ciel, It’s Raining Men s’envole dans les charts et truste les premières places. La mélodie vulgairement accrocheuse, et les paroles loin d’une dissertation philosophique, feront le reste, transformant le morceau en hymne populaire, et obligé de tout karaoké qui se respecte, tout autant féministe que gay, militant que sexuel, premier que second degré. Pourtant, malgré six millions de copies vendues autour du monde, des prestations un peu partout dans les clubs, et quelques albums dans la foulée essayant de capitaliser sur le succès de It’s raining men, les deux présentatrices météo ne renouvelleront pas le jackpot une deuxième fois. Fini de faire la pluie et le beau temps sur les hit-parades !

Depuis le titre est devenu un inconscient de la culture populaire, repris en live par Sylvie Vartan, apparu dans un épisode des Simpsons (c’est le morceau préféré de Homer), coverisé par Geri Halliwell pour la B.O. de Bridget Jones, pastiché par RuPaul de Drag Race, voire même transformé par des supporters d’un club de foot israélien, qui n’ont visiblement pas tout à fait saisi le contexte chaud du slip de la chanson, en Israeli Men. A l’image du tube I Will Survive de Gloria Gaynor, dont la signification profonde - la résilience face à l’épidémie de sida - a été totalement gommée quand le classique est devenu un obligé des stades de foot !

Partager:
PUB
PUB