Voilà 34 ans que le magazine RemAides accompagne les personnes vivant avec le VIH et les hépatites virales. Objet unique en son genre en Europe, il informe, décrypte, rend visibles et audibles les principaux intéressés. Rencontre avec ses plumes, Jean-François Laforgerie et Fred Lebreton.
Vous êtes deux journalistes pour traiter des sujets de Remaides. Pouvez-vous vous présenter ?
Jean-François Laforgerie : J’ai longtemps travaillé comme journaliste dans la presse communautaire LGBT, gratuite ou en kiosques, aux côtés de Jacky Fougeray et de Didier Roth-Bettoni pour Illico, Double Face, Ex Aequo, des journaux X étrangers en édition française, etc. En 2007, à la suite de l’arrêt de la version papier d’Illico, j’ai rejoint AIDES comme coordinateur éditorial de Remaides, le journal trimestriel des personnes vivant avec le VIH et les hépatites virales de l’association. J’en suis aujourd’hui le rédacteur en chef. Je travaille avec Fred et un comité de rédaction composé de volontaires de AIDES particulièrement engagés-es dans cette aventure. Je réalise aussi des articles pour la partie actu du site de AIDES (https://www.aides.org/lesactus). Je suis, par ailleurs, volontaire de AIDES.
Fred Lebreton : Je suis militant pour l’association AIDES et activiste dans la lutte contre le VIH/sida depuis 2011. En 2018, je me suis fait connaitre en lançant le blog Fred Colby (https://fred-colby.com/) où j’écrivais des billets sur ma vie d’homme gay et séropositif. En 2019, J’ai co-créé avec mon ami Julien Ribeiro, @seropos_vs_grindr (www.instagram.com/seropos_vs_grindr/), un compte Instagram qui dénonce et déconstruit la sérophobie sur les applis de drague gays. En juillet 2020, j’ai rejoint l’équipe de Remaides en tant que journaliste. J’écris des articles pour la version papier du journal et aussi pour la partie actu du site de AIDES (https://www.aides.org/lesactus). Quelques mois plus tard, en octobre 2020, j’ai publié un livre intitulé T’as pas le sida j’espère?! (Librinova) sous mon nom de blogueur Fred Colby. À travers mon travail pour Remaides, j’aime dire que je suis un passeur d’histoires qui aide d’autres personnes vivant avec le VIH à raconter leur vécu et témoigner.
Pouvez-vous nous raconter l’aventure Remaides ?
J-F. L. : Le journal a été créé en 1990 par des volontaires de l’association AIDES : René Froidevaux, Philippe Beiso et Yvon Lemoux. Ils sont tous les trois décédés des suites du sida. Remaides est aujourd’hui l’unique journal français disponible en format papier destiné aux personnes vivant avec le VIH et les hépatites virales (https://www.aides.org/Remaides). Remaides est de loin le plus ancien titre de presse consacré au VIH et aux hépatites virales en Europe. Le comité de rédaction est composé de deux salariés à temps plein (Fred et moi) et de volontaires dont certains-es présents-es depuis de nombreuses années.
F. L. : Nous avons un tirage trimestriel de plus de 15 000 exemplaires. Le journal est diffusé gratuitement dans la plupart des lieux de prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH et les hépatites virales, mais aussi dans les associations de lutte contre le VIH, les lieux de convivialité LGBT+, en partenariat avec l’Enipse et chez les particuliers-ères qui s’abonnent. Il est également disponible en ligne en version Flipbook (https://www.aides.org/lesremaides).
Pourquoi avez-vous procédé à une refonte du support ?
J-F. L. : C’était une volonté du Conseil d’administration de AIDES, l’instance politique de l’association, qui a voté en 2020 une clarification de la ligne éditoriale du journal. Il a été décidé que Remaides devait s’adresser en priorité aux personnes vivant avec le VIH et les hépatites virales pour faire entendre leur voix et leur donner plus de visibilité. La publication a ainsi choisi de consacrer ses « unes » à celles et ceux dont la parole est encore trop souvent ignorée, voire dénigrée.
Que trouve-t-on dans Remaides ?
J-F. L. : En Une de chaque numéro, une personne vivant avec le VIH témoigne à visage découvert. Ce sont des photos inédites réalisées par notre photographe Nina Zaghian. Dans la première partie du journal, les lecteurs-rices peuvent découvrir des portraits ou interviews de personnes vivant avec le VIH ou les hépatites qui ouvrent la section VISIBLES ! Nous sommes convaincus que la visibilité est une arme puissante contre la sérophobie ; c’est sans doute la plus efficace.
F. L. : Les autres sections du journal abordent un éventail de thématiques essentielles dans la vie des PVVIH (traitements et prise en charge, droits et lutte contre les discriminations, réflexions, bien être, culture, mémoire, etc.). Chaque numéro propose aussi un reportage inédit et un sujet traité par l’image, au sein d’une maquette réalisée par Studio Capuche qui permet une lecture plus agréable, un repérage plus facile et une place plus importante donnée aux visuels.
Quels sont les sujets chauds que l’on trouve dans Remaides ?
F. L. : Une de nos rubriques phare est Générations Positives qui propose dans chaque numéro un entretien croisé entre deux personnes vivant avec le VIH qui sont de deux générations différentes et qui ne se connaissent pas. À ce jour, nous avons réalisé 15 entretiens croisés : soit 30 personnes vivant avec le VIH, ouvertement visibles ! Notre Une du mois de décembre 2023 a beaucoup fait parler d’elle. Il s’agit de Yassin Chekkouh (https://www.aides.org/remaides/itw-yassin-chekkouh). Coach sportif, mannequin et activiste dans la lutte contre la sérophobie, Yassin est fier de son parcours, qu’il partage avec les lecteurs et lectrices de Remaides.
J-F. L. : Il y a aussi la rubrique sexo du Dr Patrick Papazian, le billet de la présidente de AIDES, Camille Spire ou encore la rubrique Mémoires vives de notre collègue Morgane Vanehuin, archiviste de AIDES, qui renoue l’histoire de AIDES et les enjeux actuels de la lutte contre le VIH.
Quels sont les sujets phares qui seront traités dans Remaides sur 2024 ?
J-F. L. : Outre les portraits, le suivi de l’actualité et nos rubriques habituelles, nous travaillons sur plusieurs gros dossiers qui seront égrenés dans les prochains numéros. Il y aura, entre autres, un dossier sur cancer et VIH, la santé sexuelle, les nouvelles recommandations du rapport d’experts sur le VIH et les hépatites virales, un numéro autour de la sérophobie et nous allons aussi couvrir les États généraux des personnes vivant avec le VIH en mai prochain et les 40 ans de AIDES, cet automne.
F. L. : Nous travaillons toujours sur deux voire trois numéros à la fois. Le mois prochain, en mars, nous allons faire l’interview et la séance photo du numéro d’été. On garde le secret pour l’instant mais cette « une » devait plaire aux lecteurs-rices de Strobo…
Quelque chose à rajouter ?
J-F. L. : Je parlais du côté unique de Remaides dans le paysage de la presse. Ce trimestriel, consacré à un sujet à la fois de santé et sociétal qui a profondément marqué (et le fait encore) les communautés LGBT+, a, aujourd’hui, 34 ans. C’est un record qui doit tout à l’engagement opiniâtre des militants-es de AIDES, depuis ses fondateurs jusqu’à celles et ceux qui s’y impliquent encore.
F. L. : Merci de nous lire et merci à toutes les personnes qui partagent nos contenus sur les réseaux sociaux. Avant d’être journaliste de Remaides, j’étais moi-même lecteur assidu du journal. Nous avons de la chance d’avoir toujours ce média en format papier. C’est un outil d’empowerment et de visibilité précieux pour toutes les personnes vivant avec le VIH.
